QUELQUE part - comme disaient les branchés des années 80 devenus les ringards de maintenant -, je suis admiratif des auteurs qui arrivent à parler des heures de leur dernier bouquin. Ils doivent sans doute beaucoup l’aimer. Ce qui ne signifie pas que je déteste le mien, mais je ne peux l’évoquer que par l’écriture. Vous me direz que cela revient au même et que je ne m’en prive pas… si vous voulez ! N’empêche que lorsque j’assiste fait rarissime à un salon, je peine dans cet exercice et j’ai toujours envie de dire, ben t’as qu’à lire la « quatrième » et fait pas ch.er ! Mais, changement de décor, lorsque je suis à la maison et que je reçois des gens proches en parentés ou en amitiés, cela me fait plaisir d’échanger sur mon roman et de déflorer même éventuellement le prochain. Et là, oh ! Surprise, il devient très rare que l’une des relations en question daigne s’intéresser à ma production. Il y en a même eu qui s’empressent de me signaler une faute ne vinrent jamais, pour me racheter, saluer une idée ou une formule un tant soi peu léchée. On n’écrit en principe ni pour être encensé et moins encore pour s’enrichir. Enfin c’est ainsi que je perçois l’exercice qui me vaut toujours les mêmes sensations de bien-être et d’accomplissement, parfois jusqu’au frisson. Il y a du plaisir, des vibrations et dans mon cas aussi, de l’anxiété à savoir comment le bouquin va sortir de l’imprimerie et surtout comment il sera reçu. Sans presse et sans réseau je ne m’attends jamais à des tirages faramineux, mais bon sang ce que je suis heureux que quelques centaines de lecteurs me fassent confiance et se régalent depuis maintenant une décennie. Ce qui ne m’empêche d’être subjugué par cette sorte d’indifférence qui m’accable dans le premier cercle amical et familial. J’emploie le mot subjugué à dessein, car c’est effectivement fascinant. On dit bien « nul n’est prophète en son pays » mais c’est aussi le cas dans son propre environnement. Comment ces gens, qui se reconnaîtraient s’ils lisaient ces chroniques hebdomadaires, font pour se comporter comme s’ils ne savaient pas que je publie un livre chaque année ? Pour parfois passer un week-end et même une semaine en visite chez moi sans une fois évoquer « le petit dernier » ? C’est étonnant, non ? Tout récemment encore, une invitée jouissant du gîte et couvert expliquait à la cantonade qu’elle aimait lire, mais uniquement ce qui l’intéressait ! Sous-entendu « toi tu ne m’intéresses pas ! » Ne souffrant ni d’égocentrisme boursouflant, ni d'aucune trace de paranoïa, je me contente donc de penser que loin de vouloir me blesser ou de m’invibiliser, il s’agit seulement d’un.e con.ne ! J’entends par là de quelqu’un qui n’a ni éducation, ni civilité. Ni trop d’empathie non plus, quand même ! Il y a aussi évidemment les jaloux. Là il s’agit d’une maladie fortement handicapante et que l’on pourrait imaginer contagieuse, tant elle est répandue. Mais jaloux de quoi, puisque ceux qui me viennent à l’esprit n’écrivent, ou en tout cas, ne publient pas ? Je ne pense évidemment pas à mes chers enfants qui eux, suivant une ligne tracée dans le cheminement classique des conflits de générations, attendront que je me rapproche un peu plus de la mort pour se sensibiliser et s’adoucir. Je fus fils et je parle en expert, moi qui ai fort longtemps ignoré les travaux de mon père, avant de rassembler ses écrits pour en éditer avec joie, deux petits recueils. Je ne sais pourquoi je vous raconte cela. Peut-être parce qu’aujourd’hui, alors que la Flotille de la liberté et l’équipage du Madleen viennent d’être arraisonnés par un monstre, j’ai besoin de partager une certaine forme de tristesse. Mais pour me ressaisir, je vais saluer la visite vivifiante d’un ami que j’attendais depuis dix ans. Merci Stéphane ! Et l’accueil formidable, émouvant même de Nathalie, la responsable de la maison de l’Aubrac où j’ai passé, ce dimanche, un joli moment de rencontres (sans même penser à prendre quelques photos et là je vieillis pour de bon !). Grâce à Marc aussi, un lecteur qui venait de découvrir la Petite fille dans la tourmente et qui envoya à Aubrac ses amies Jeannine et Chantal de Marvejols, se procurer Le Petit garçon et ce sacré Lire et délire, dont la folie n’a pas encore totalement gagné mon entourage ! |
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