lundi 15 septembre 2025

 


Quand Nasbinals se met à lire

Certes, en Aubrac, on a plus l'habitude de regarder des photos ! Mais c’est encore et toujours du délire ! Merci aux Nasbinalais qui ont, en masse, répondu à mon invitation à partager l’apéro. Boire un coup et boire les lignes de ce livre conduit en quelque sorte à la même ivresse et par ces temps aux issues incertaines - ou même malheureusement prévisibles - cet élan de sympathie, mais également cette frénésie de lire, font chaud au coeur. Or, même si l’on n’est pas réellement en manque de chaleur, celle que procure l’amitié, la solidarité villageoise vous marque toujours émotionnellement. Et l'on se dit alors que l'on a bougrement  bien fait de venir s'installer ici ! 
Je dois à l'humilité de concéder que j’avais quelques atouts, il est vrai, dans la manche. L’organisation de cette rencontre le soir en semaine, après une journée de travail et à l’heure de l’apéro, s’avérait particulièrement favorable. Le lieu aussi compte pour beaucoup, voire pour essentiel. La Route d’Argent de la famille Bastide est incontournable et les Nasbinalais s’y rendent avec une enthousiaste fidélité. Qui dit Bastide dit également touristes, comme tous les jours en cette époque bénie par Saint-Jacques, pèlerins et juénistes, convergent vers ce haut-lieu de l’accueil simple mais efficace et chaleureux - encore ! -. Et comme j’allais avoir toutes les chances, ce jeudi-là était aussi soirée de Conseil municipal, ce qui permettrait immanquablement d’avoir la visite de nombreux élus…
Et voici comment on réalise un joli carton plein. Qui m’a permis de mesurer à quel point j’étais considéré par les Lozériens de l’Aubrac comme l’un des leurs. J’ai pu mesurer à la fois leur soutien indéfectible, leur esprit d’ouverture légendaire et leur générosité, leur goût tout aussi notoire pour la lecture.
Dans de telles conditions, inutile de le préciser : j’y reviendrai !

Aziz Zany et la dispute sociologique

Si je ne me trompe, il ne m’a pas encore été donné d’évoquer l’un des personnages, certes secondaires mais participant de l’intrigue, le dénommé Aziz Zany. Ah, je vous sens un peu sur la défensive ! Alors il me faut sans plus attendre vous rassurer. Il ne s’agit pas de l’un de ces terroristes soutiens du Hamas, ni d'un frère organisateur du grand remplacement. Aziz Zany est un sociologue propre sur lui, inspiré de Raymond Boudon et Pierre Bourdieu, auteur d’une série d’études portant sur le délitement de la société à travers les comportements humains dans la cité. Diantre ! allez-vous me dire - si, si, je suis sûr que vous alliez le dire – qu’allait donc faire un homme aussi sérieux au Festival Lire et délire de Chantemerle où il s’agit de désigner le titre le plus drôle de l’année. Mais ce n’est pas parce que c’est drôle que ce n’est pas sérieux, ni intéressant, ni intelligent d’ailleurs. Celui qu’il présentait était donc Les Mouches du coach. Ce n’est pas à vous que j’apprendrai que le Coche et la mouche est l’une des plus fameuses fables du grand La Fontaine. Du reste, lorsque vous en aurez fini avec Lire et délire, je vous recommande d’effectuer un petit retour à vos classiques et ceux de ce gigantesque poète dont bien des alexandrins sonnent et résonnent encore d’une étonnante autant qu’affligeante actualité.
Dans son bouquin, Zany constate la futilité de ces coaches que l’on retrouve en entreprise, dans le sport et un peu partout, se multipliant comme des mouches, s’attribuant bien des mérites, voire des vertus qui demeurent, néanmoins, largement sujettes à caution. Mais c’est encore bien davantage la défiguration de la campagne transformée en plate-forme de business ayant entraîné la désertification des petits centre-villes paupérisés, qui nourrit son propos.
 

Extrait des Mouches du coach

 

Les premiers à s’être installés dans ces zones d’activités péri-urbaines, desservies par de grands ronds points offerts par les communes aux frais des contribuables, sont les cabinets juridiques et fiscaux. Terminé le petit comptable rond de cuir dans une usine de dix ouvriers, finis les règlements à l’amiable dans les conflits familiaux, de voisinage ou commerciaux, tout passe par les bureaux feutrés et chatoyants de professions libérales aux résultats exponentiels. J’allais oublier les architectes, eux aussi prennent leur aise et de grands airs sur les mêmes carrefours de l’ingénierie systémique. Plus question de bâtir la moindre cage à poule, sans être conseillé par l’un de ces génies de l’agencement de volumes. Et j’en reviens à la même conclusion selon laquelle c’est toujours la technocratie, à l’échelle européenne par surcroît, qui organise et amplifie la globalisation de ces pratiques, avec un maître mot : l’optimisation. Gagner plus et payer le moins d’impôts possible. Sur le modèle de ces professions providentielles (avocat, architecte, notaire, expert-comptable et leur corollaire, agent immobilier, concessionnaire automobile), s’est agglomérée toute une faune de conseillers en tout. McKinsey est devenu, par la grâce du président de la République qu’il a fabriqué, le plus réputé en France alors qu’il l’était déjà bien avant dans le monde. Véritable cheval de Troie du libéralisme, il a été, si ce n’est l’inspirateur, au moins le libérateur d’une pratique peu catholique mais prolifique…
Des coaches en entreprise, en santé mentale et en santé tout court, des coaches en bien-être, en affirmation de soi, en organisation professionnelle ou privée, il y aura probablement bientôt, un coach en cuisson de spaghetti. Appelez-les conseillers, consultants, coachs, leur floraison n’annonce pas le printemps d’une société sobre et solidaire. Et vous aurez noté que je n’étends pas mon propos aux influenceurs des deux sexes qui ne sévissent pas aux entrées de nos agglomérations mais dans le vaste marigot anonyme des réseaux sociaux. Et nous laissent sans voix. "  

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire